« J'ai touché le fond de la piscine dans mon petit pull marine
Tout déchiré au coude
Que j'ai pas voulu recoudre...
Je me sens tellement abandonnée. » Adjani/Gainsbourg
Oh ! Tragédie ! Oh ! Désespoir ! Que la vie est triste ! Monde fragile, monde cruel ! Que nous reste-t-il à vivre ?
Le suicide ?
C'est la conclusion de « Camper » le spectacle présenté au TLH par la compagnie « You should meet my cousins from Tchernobyl » et elle nous laisse ...désemparés.
On se met à frémir sur le message que ces jeunes gens (talentueux) nous délivrent.
« Avant de toucher le fond, je descends à reculons sans trop savoir ce qu'il se passait dans le fond »
Les intentions et le cadre conceptuel sont pourtant très cohérents.
Les références intellectuelles (l'objectivisme américain qui prône une mise en lumière du réel sans jugement devant amener à un sentiment ou un état d'âme et le mouvement lo-fi qui propose de faire de la musique de façon primitive avec un son « brut, sale » s'opposant aux sonorités aseptisées de la production commerciale) sont intéressantes.
Les principes de jeux sont radicaux prônant notamment une forme de « neutralité » et une intonation dénuée de trop d'émotion. Cela laisse au spectateur la responsabilité de s'approprier le texte, de l'interpréter.
Le spectacle a une réelle force, une intense cohérence.
Cette compagnie a un univers.
Mais ...
«C'est plein de chlore au fond de la piscine, j'ai bu la tasse Tchin Tchin ...»
Mais ....
Sans une bonne dose de Xanax, on suffoque devant tant de noirceur.
Pourtant, l'une des volontés principales est de proposer, au plateau, des personnages aux relations sereines, bienveillantes. Cette intention louable me paraît noyée dans un climat trop anxiogène.
On est interrogé par l'éternelle fascination du théâtre, de l'art pour le drame.
On fantasme une jeunesse plus conquérante, moins déçue ...
On est interpellé devant cette génération ...déconcertante.
« Viens vite au fond de la piscine ... repêcher ta petite sardine. L'empêcher de se noyer ...»
Alain Bonvin
© Pierre Daendliker